Légitimité de la propriété privée (le bois mort n’appartient plus à l’arbre)

« Marx conteste ainsi la logique de la loi en faisant mine de se placer du point de vue du propriétaire dont le droit de propriété revendiqué serait légitimé par le fait que l’arbre pousse sur son domaine, ou que le bois façonné (transformé par un travail) en est issu. Le ramasseur de ramilles serait alors en droit de lui opposer un argument découlant d’une interprétation légitime d’un droit supposé naturel : le bois mort n’appartient plus à l’arbre, ni, par conséquent, au propriétaire de l’arbre. Il en résulte qu’on ne saurait réunir les deux actes sous un même délit, sauf à ignorer la différence entre les actes par lesquels se manifeste l’intention. Marx suggère alors avec malice qu’une telle confusion pourrait alors se retourner contre le propriétaire. Ce “point de vue brutal”, qui “ne retient pour différentes actions qu’une disposition commune et qui fait abstraction de toute différenciation”, finirait par se nier lui-même : “en considérant indifféremment comme vol toute atteinte à la propriété sans distinction, sans plus ample détermination, toute propriété privée ne serait-elle pas du vol ?”. La controverse se déplace alors de la question de la délimitation d’un droit légitime de propriété à celle de la légitimation de la propriété privée en tant que telle, soulevée deux ans plus tôt par Proudhon dans son mémoire Qu’est-ce que la propriété ? », p. 18.

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