Hannah Arendt s’inquiétait que la politique puisse disparaître complètement du monde. Les désastres du siècle étaient tels que la question de savoir si la politique avait « encore un sens » devenait inévitable. Pour elle, le totalitarisme était la forme de cette disparition redoutée. Nous avons aujourd’hui affaire à une autre figure du péril : le totalitarisme à visage humain du despotisme de marché. La politique s’y trouve laminée entre l’ordre naturalisé des marchés financiers et les prescriptions moralisantes du capital ventriloque. Fin de la politique et fin de l’histoire coïncident alors dans l’infernale répétition de l’éternité marchande.
L’idée d’une autre société est devenue presque impossible à penser, et d’ailleurs personne n’avance sur le sujet dans le monde d’aujourd’hui. Nous voici condamnés à vivre dans le monde où nous vivons. Daniel Bensaïd, qui s’inscrit en faux contre cette problématique, tente ici de répondre à cette désespérance en portant son attention aux débats du mouvement altermondialiste, en interrogeant Marx, Lénine et les années 1970, notamment en Europe du Sud et en Amérique latine. Il souligne tout à la fois les continuités et les ruptures, afin de donner de la profondeur théorique et historique aux controverses actuelles.
Recueil de textes préfacés par Antoine Artous
• Daniel Bensaïd ou la politique comme art stratégique, par Antoine Artous