Ce livre est un bêtisier de la pensée réformiste. Rocard, qui l’incarne avec le plus d’enflure satisfaite, y sert de fil conducteur. L’originalité qu’il affiche et la différence à laquelle il prétend ne sont qu’un habillage idéologique rénové pour les vieilles politiques de collaboration de classe. C’est pourquoi il se trouve inévitablement au point de rencontre de la vieille social-démocratie, des courants eurocommunistes européens et de certaines tendances de la bureaucratie syndicale (dans la CFDT mais aussi dans la CGT). Ce « petit marquis » est passé maître dans l’art de conjuguer l’autogestion au futur et la gestion au présent, d’aller au-devant des projets néolibéraux de la bourgeoisie moderniste, d’escamoter le passé compromettant de la social-démocratie, au nom de la confrontation entre les « deux cultures » (autogestionnaire et stalino-jacobine) qui partageraient historiquement le mouvement ouvrier français.
Économiste du désir et apôtre de l’auto-assistance, les « nouveaux utopistes » entrent avec lui dans la carrière de la mode, à la suite des nouveaux philosophes et des nouveaux économistes. À quoi sert Rocard ? Le marxisme est-il malade de l’État ? L’expérimentation sociale ou l’autogestion peuvent-elles tenir lieu de stratégie révolutionnaire ?
Au fil de ces questions apparaissent les impasses politiques, les révisions théoriques, le néant stratégique du réformisme (social-démocrate ou d’origine stalinienne) face à la crise du capitalisme. Face à ces utopies en guenilles et haillons, pour temps de vaches maigres, la lutte pour un communisme authentiquement révolutionnaire est plus actuelle et nécessaire que jamais.